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Lettre conjointe

Lettre conjointe

 À : Tous les membres et observateurs du Conseil des droits de l'homme des Nations unies

Objet : Le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies devrait créer de toute urgence un mandat indépendant pour enquêter sur les violations des droits humains et les abus commis par toutes les parties dans l'est de la République démocratique du Congo

Excellences, Nous, les 75 organisations congolaises, régionales, et internationales de défense des droits humains soussignées, vous écrivons pour vous demander d'oeuvrer d'urgence à la mise en place, dans le cadre d'une session extraordinaire du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, d'un mandat indépendant ayant pour fonction d'enquêter et de réaliser un rapport sur les graves violations des droits de humains et les abus commis par toutes les parties au conflit dans l'est de la République démocratique du Congo, et de soutenir les efforts menés pour que les auteurs de ces actes rendent des comptes. Le conflit entre les forces rwandaises et le groupe armé M23, d'une part, et l'armée congolaise et les groupes armés auxquels elle s’est alliée, d'autre part, s'est intensifié depuis l'offensive du M23 sur Goma, la capitale de la province du Nord-Kivu, en janvier 2025. La résurgence du M23, avec le soutien du Rwanda et de l'Ouganda, à la fin de l’année 2021 et le conflit qui s'en est suivi dans l'est de la République démocratique du Congo ont eu un impact dévastateur sur la vie des civils qui, depuis des décennies, sont confrontés à des dégradations et à des abus. Lors des récents combats, au cours desquels le M23 a pris le contrôle de Goma, des groupes de défense des droits humains et des médias ont fait état de meurtres, de viols, de pillages, de travail forcé et de recrutement forcé. Les forces rwandaises et le M23, ainsi que l'armée congolaise et ses alliés, commettent depuis longtemps de graves violations du droit international humanitaire, notamment des bombardements sans discernement, des attaques contre des civils et des infrastructures civiles, des meurtres, de la torture, des viols et des pillages. Les autorités congolaises et le M23, qui a annoncé le 30 janvier la création d'une autorité civile chargée de gouverner les territoires occupés, ont commis des violations des droits humains et des abus dans le passé, y compris des restrictions des droits à la liberté d'expression et d'association, des arrestations et détentions arbitraires et des actes de répression contre les défenseurs des droits humains. Les efforts de justice pour les crimes graves commis dans l'est du Congo ont longtemps été insuffisants pour répondre aux abus généralisés commis par toutes les parties. Cette impunité pour les abus passés constitue l'un des principaux moteurs des graves violations commises au cours du conflit actuel. Il est plus important que jamais que les gouvernements concernés fassent part de leur engagement à assurer la reddition des comptes. La situation humanitaire actuelle à Goma est particulièrement grave. Les résidents de la ville, ainsi que des centaines de milliers de personnes déplacées, ont un accès insuffisant à la nourriture, à l'eau et à l'électricité. Le M23 et les forces rwandaises ont des obligations envers les civils en vertu du droit international humanitaire, notamment celle de protéger et de faciliter l'accès à l'aide humanitaire et de permettre la liberté de mouvement. La crise actuelle exige la plus grande attention et des actions complémentaires de la part de tous les acteurs des systèmes internationaux et régionaux de protection des droits humains. Dans une déclaration du 31 janvier, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme a affirmé qu’« il est essentiel que des enquêtes soient menées sur les violations commises, afin de traduire les auteurs en justice et de garantir l’établissement complet des responsabilités ». Le Conseil des droits de l'homme, conformément à son mandat de prévention des violations et de réaction rapide aux situations d'urgence en matière de droits humains, a un rôle essentiel à jouer pour assurer un examen indispensable de la crise actuelle. Cela inclue la collecte de preuves et un soutien aux efforts déployés pour que les auteurs d’abus rendent des comptes, à l’instar de ceux menés par la Cour pénale internationale au Congo dans le cadre de son enquête en cours. Dans ce contexte, nous, les organisations de défense des droits humains soussignées, appelons respectueusement tous les États membres du Conseil des droits de l'homme à agir de toute urgence pour faire face à la crise actuelle et faire savoir à toutes les parties au conflit qu’elles seront tenues responsables des crimes graves qu'elles commettent. Le Conseil devrait établir d'urgence un mandat indépendant ayant pour fonction, entre autres, de : - Mener une enquête approfondie sur toutes les violations et tous les abus du droit international des droits humains et du droit international humanitaire commis par toutes les parties au conflit actuel, y compris ceux qui constituent des crimes au regard du droit international, depuis la résurgence du M23 à la fin de l'année 2021 ; - Établir les faits, les circonstances et les causes profondes des violations et abus actuels ; - Recueillir, consolider, préserver et analyser les preuves de ces violations et abus, y compris les violences sexuelles et basées sur le genre, et enregistrer et préserver systématiquement toutes les informations, la documentation et les preuves, y compris les entretiens, les témoignages et le matériel médico-légal, conformément aux normes internationales et aux meilleures pratiques, en vue de toute procédure judiciaire future ; - Identifier, dans la mesure du possible, les personnes et les entités présumées responsables de violations et d'abus graves du droit international des droits humains et de violations du droit international humanitaire, y compris ceux qui constituent des crimes au regard du droit international, afin de veiller à ce qu'elles soient tenues de rendre des comptes de manière appropriée ; et - Faire des recommandations pour mettre fin aux violations et aux abus et obliger les auteurs à rendre des comptes, afin de mettre fin à l'impunité et de garantir le droit à un recours effectif et à la justice, à la vérité et à des réparations pour les victimes, les survivant(e)s et leurs familles. Ce mandat indépendant devrait être invité à : - Rendre compte régulièrement de l’avancée de son travail, notamment en ce qui concerne les conclusions de ses enquêtes et les recommandations visant à faire progresser l'obligation de rendre des comptes, au Conseil des droits de l'homme des Nations Unies (compte tenu de l'urgence de la situation, une première mise à jour écrite devrait être fournie au plus tard lors de la 59e session du Conseil), ainsi qu'à l'Assemblée générale des Nations Unies ; - Intégrer une perspective de genre, une perspective des droits de l'enfant et une approche centrée sur les survivants dans l'ensemble de son travail ; et - Assurer la complémentarité et la coordination de son travail avec d'autres initiatives des Nations Unies, de l'Union africaine et d'autres entités régionales et internationales appropriées, y compris l'équipe d'experts internationaux du Conseil des droits de l'homme sur la République démocratique du Congo et le Bureau du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme. Le Conseil des droits de l'homme devrait fournir d'urgence le soutien administratif, technique et logistique ainsi que le personnel nécessaires pour permettre au mandat d’être mis en oeuvre sans délai, en particulier dans les domaines de l'établissement des faits, de l'analyse juridique, de la traduction et de l'interprétation, et de la collecte et de la préservation des preuves, y compris en ce qui concerne les violences sexuelles et basées sur le genre ainsi qu’une expertise balistique et médico-légale spécialisée. La création d'un tel mandat enverrait un message dissuasif important à tous les commandants des parties belligérantes à ce stade critique : leurs abus seront documentés et exposés, et ils devront finalement rendre des comptes. Cela pourrait également soutenir le travail de la Cour pénale internationale, qui redouble actuellement d’efforts d'enquête sur les crimes commis par toutes les parties au Nord-Kivu depuis janvier 2022, ou tout autre mécanisme de justice. Nous vous demandons d'oeuvrer à la mise en place du mandat susmentionné et nous nous tenons à votre disposition pour vous fournir tout complément d'information nécessaire. Signé : 1. 11.11.11 2. Action des Chrétiens Activistes des Droits de l'Homme à Shabunda 3. Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture – RDC 4. Action Globale pour la Promotion Sociale et la Paix 5. Action pour la Restauration de la Paix et la Justice 6. Action pour le Développement Intégral et Durable 7. Action Sociale pour la Paix et les Droits Humains 8. Actions des Chrétiens pour la promotion de la Paix et du Développement 9. Actions Rapides des Développements 10. African Center for Peace, Democracy and Human Rights 11. African Social Cohesion and Entrepreneurship Network 12. Agir ensemble pour les droits humains 13. Agir RDC 14. Amis des Droits de l'homme en DR Congo 15. Amnesty International 16. Assistance Internationale pour le Développement 17. Association Africaine de Défense des Droits de L'Homme 18. Association Africaine de Défense des Droits de l'Homme - section du Katanga 19. Association d'Actions de Paix et de Développement Communautaire 20. Association des Cultivateurs des Collectivités de Batangi et Bamate 21. Association pour la Santé et Développement de l'Enfant et la Femme 22. Association pour le Développement des Initiatives Paysannes 23. Association pour les droits de l'homme et droit humanitaire 24. Badilika droits humains 25. Centre d’Observation des Droits de l’Homme et d’Assistance Sociale 26. Centre de Recherche Dignity 27. Centre d'Espoir pour les Droits Humains 28. Centre Indépendant de Recherches et d'Études Stratégiques au Kivu 29. Centre pour la Justice et la Réconciliation 30. Coalition des Volontaires pour la Paix et le Développement 31. Commission Diocésaine pour la Justice et la Paix 32. Committee to Protect Journalists 33. DefendDefenders (East and Horn of Africa Human Rights Defenders Project) 34. Eglise du Christ au Congo/Ministère des Réfugiés et des Urgences 35. Espoir pour Tous au Congo 36. Fédération internationale de l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture 37. Fédération internationale des ligues des droits humains 38. Femmes Unies pour le Développement 39. Filimbi, mouvement citoyen 40. Fondation Bill Clinton pour la Paix 41. Global Centre for the Responsibility to Protect 42. Groupe Lotus 43. Héritiers de la Justice 44. Human Rights Defenders Network-Sierra Leone 45. Human Rights Watch 46. Initiative pour la Protection des Droits de l'Homme et la Réinsertion Sociale 47. International Commission of Jurists 48. International Bar Association's Human Rights Institute 49. International Service for Human Rights 50. Justicia Asbl 51. La voix du savoir 52. Ligue des défenseurs des droits des malades 53. Ligue des Droits de la personne dans la région des Grands Lacs 54. Ligue des Électeurs 55. Ligue Internationale des Conseillers 56. Ligue Nationale Paysanne des Droits de l’Homme 57. Lutte Pour Le Changement 58. Monde d’Espoir-RDC 59. Nobel Women's Initiative 60. Nouvelles Dynamiques pour le Développement Rural Intégral 61. Nouvelle société civile congolaise 62. ONG Mama Ni Mama 63. Organisation pour le bien être des Albinos 64. Ouvriers du Monde 65. Parliamentarians for Global Action 66. Pax Christi International 67. Pona Ekolo, mouvement citoyen 68. Protection International 69. Psychologues Sans Frontières 70. Solidarité Féminine Pour la Paix et le Développement 71. Solsoc 72. SOS Information Juridique Multisectorielle 73. Synergie de défense et protection des défenseurs des droits humains, victimes et témoins 74. Umoja-Africa RDC 75. Women International Peace Centre

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JUSTICIA Asbl

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